Lola vers la mer… et Jumbo

Deux premiers longs-métrages, deux femmes, deux envies de s’émanciper face à une société qui leur fait comprendre qu’elles auraient tout intérêt à rentrer dans le moule.

Jumbo – Crédit: AZ Films

D’un côté, Jeanne ( merveilleuse Noémie Merlant), introvertie, le carré option frange et des airs d’ado, gardienne de nuit dans un parc d’attraction qu’elle côtoie depuis l’enfance, satisfaite de son cocon créé avec sa mère excentrique (Emmanuelle Bercot), jusqu’au jour où elle tombe amoureuse de la nouvelle attraction du parc qui donne son nom au film et que la jeune femme surnomme “Jumbo“. 

De l’autre, Lola (Mya Bollaers), 18 ans, skateuse aux cheveux roses, pour la première fois à nouveau face à son père (Benoît Magimel) qui l’a mise dehors et qu’elle revoit alors que sa mère vient de mourir. Si elle avait mis de côté pour aider sa fille à concrétiser son opération, lui n’a jamais accepté sa fille transgenre.

Lola vers la mer – Crédit: Axia Films

Malgré sa sobriété et son approche réaliste qui servent son propos, Lola vers la mer de Laurent Micheli ne parvient jamais à une tentative de déconstruction du modèle de masculinité toxique incarné par le père de Lola, dont la violence se répercute dans ses paroles, lui qui ne cesse d’ailleurs d’appeler sa fille par son prénom donné à la naissance, Lionel.

Dommage, Laurent Micheli passe à côté d’un élément important: pour un film dont la protagoniste est une personne transgenre, quel rafraîchissement cela aurait été de voir un long-métrage qui assume de ne pas du tout en faire un sujet. Certes, le film parle de la relation père-fille, mais le principal point d’incompréhension reste les changements que le paternel ne parvient pas à comprendre chez son enfant, lui qui croit avoir perdu un fils alors qu’il a toujours eu une fille.  

Malgré une relation amoureuse centrale clairement empruntée au fantastique, Jumbo – drame inspiré de l’histoire vraie de l’américaine Erika Eiffel, tombée amoureuse de la tour Eiffel – baigne lui aussi dans un récit très ancré à la réalité pour livrer son message.

Jumbo – Crédit: AZ Films

La scène la plus imagée du film, apogée d’une réalisation soignée dans un décor blanc ou la jeune femme est recouverte d’un liquide noir, aurait gagné à être développée au même titre que l’exploration du plaisir féminin. Surtout pour un film qui porte en son coeur le champ lexical de l’imaginaire. La sexualité avec les machines y est dépeinte comme plus jouissive qu’avec les hommes – un message qui veut tout dire – comme l’incarne cette relation entre Jeanne et Marc, gérant du parc très insistant. 

Le premier long-métrage de Zoé Wittock est un film d’un genre nouveau qui fait plaisir à voir. Bien que rafraîchissant, Jumbo – qui a mis huit ans à voir le jour – souffre d’un sous-développement de ses personnages. Un défaut qu’on retrouve chez ceux qui portent à l’écran Lola vers la mer, desquels on aurait aimé deviné davantage de complexité et de failles…

Jumbo et Lola et la mer sont en salles au Québec depuis le 11 septembre

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